À La Rochelle, en 1699, la levée d’engagés pour Québec est l’affaire des recruteurs suivants :
- Paul Berry, agissant pour le sieur Lebert (Québec);
- Jean Lagrange, marchand de Québec (Québec);
- Pierre Martel, marchand de Québec (Québec);
- François Pachot, agissant pour la veuve Pachot (Québec);
- Claude Pauperet, marchand de Québec (Canada);
- Jean Peré, marchand de La Rochelle (Canada).
Originaire de Fleurance (Gascogne)[1], le marchand rochelais Paul Berry en est à sa première levée d’engagés pour Québec. Il est propriétaire du navire La Ville-Marie.
QUATRE NOUVEAUX ENGAGÉS Lors de la transcription de son article dans la revue RHAF, Gabriel Debien a relevé quatre engagés. Il faut ajouter François Chaumelier, Paul Gautier, Étienne Lebaume et Jean Viau. L’engagé Jean Bouclier a été recruté en 1699 (et non 1700). |
L’enrôlement des quatre travailleurs s’effectue les 25 et 26 juin. C’est à bord du navire La Ville-Marie, dans la rade de Chef de Baie, que le notaire rochelais Jean Grenot convient de leurs conditions d’engagement avec Paul Berry, marchand de La Rochelle, ayant ordre du sieur Lebert, de Québec. Probablement Jacques Lebert (1663-1735), sieur de Senneville.
Sont présents à la rédaction des contrats et signataires : Claude Pauperet, marchand demeurant au Canada, et Jean Laguerre, cuisinier sur le navire La Ville-Marie.
Le premier engagé est le tourangeau Paul Gautier (25 juin). Il est suivi de l’auvergnat François Chaumelier, du tourangeau Étienne Lebaume et du laboureur saintongeais Jean Viau (26 juin).
Chaque engagé décline ses prénom et nom, son lieu de naissance et sa profession (un engagé). Le notaire écrit le salaire annuel (entre 50 et 60 livres) sans aucune avance, ni même de salaire (un engagé), payable au fur et à mesure qu’il en aura besoin. Un engagé appose sa signature.
Les engagés promettent d’aller servir le sieur Lebert, de Québec, en tout ce qui leur commandera « en Canada ». Leur passage est aux frais de l’employeur qui va les nourrir, loger et blanchir pendant trois années et durant la traversée.
Dans son contrat, l’engagé mentionne le nom de ses père et mère, nous informant davantage sur sa généalogie.
Les engagés promettent de s’embarquer dans le navire La Ville-Marie qui est prêt à faire voile pour aller à Québec.
Voici le contrat d’engagement entre Paul Berry (l’engagiste) et Jean Viau (l’engagé) en 1699.
Engagement Viau à M. Berry. (graphie contemporaine) |
Par-devant le notaire royal à La Rochelle soussigné. Fut présent en sa personne Jean Viau, laboureur, d’Ozillac en Saintonge, fils de Michel Viau et de Marie Hulet, âgé de vingt ans ou environ. Lequel volontairement s’engage au sieur Paul Berry, marchand, demeurant en cette ville de La Rochelle, à ce présent et acceptant, faisant pour monsieur Lebert, de Québec en Canada, en vertu d’ordre pour aller servir ledit sieur Lebert en tout ce qu’il lui commandera, le temps et espace de trois années qui commenceront du jour que ledit navire arrivera audit Québec. Et à cette fin, sera tenu de s’embarquer aux premiers ordres que ledit sieur Berry lui donnera et sera passé aux frais dudit sieur Lebert, nourri, logé et blanchi pendant lesdites trois ans et pendant la traversée et payé desdits gages et salaires à raison de soixante livres, argent de France, par chacun an à mesure qu’il en aura besoin. Ce qui a été convenu et à l’entretien, les parties es dits noms obligent tous leurs biens présents et à venir. Dont jugés &. Condamnés &. Fait à bord de La Ville Marie, en la rade de Chef de Baie, après-midi, le vingt-six juin mille six cent quatre-vingt-dix-neuf. Présents le sieur Claude Pauperet, marchand de Canada, et Jean Laguerre, cuisinier sur ledit navire La Ville Marie. Et a ledit Viau déclaré ne savoir signer. Signatures |
Qui sont les engagés de Paul Berry de 1699?
François Chaumelier |
Étienne Lebaume |
Paul Gautier |
Jean Viau |
Un engagé est originaire d’Auvergne, un de Saintonge et deux de Touraine.
Les quatre engagés quittent la rade de Chef de Baie à La Rochelle, fin juin, à bord du navire La Ville-Marie (200-300 tx) à destination de Québec.
Que sont-ils devenus ?
CHAUMELIER, François (c1677-1749) |
Fils de feu Antoine Chaumelier et de Jeanne Dugoust, François Chaumelier est natif de Riom (Auvergne). Il s’engage (22 ans) à Paul Berry, le 26 juin 1699, pour aller travailler au service du sieur Lebert au Canada, durant 3 ans, à raison de 60 livres par année. Ne signe pas. Il quitte la rade de Chef de Baie à La Rochelle, fin juin, à bord du navire La Ville-Marie (200-300 tx) à destination de Québec avec escale à Bordeaux. On le retrouve à Montréal, en mars 1708, où les Sulpiciens lui concède une terre à la Côte Notre-Dame-des-Vertus. François Chaumelier épouse, le 23 novembre 1711 dans l’église Notre-Dame à Montréal, Marie Baron, fille de Léger Baron et de Marie-Anne Boudon, de Boucherville. De leur union naissent neuf enfants. En 1720, il s’oblige de rembourser la somme de 36 livres au marchand Pierre Crépeau pour des marchandises livrées la veille. En août 1739, veuf, il est toujours sur sa terre de la Côte Notre-Dame-des-Vertus avec deux jeunes bœufs, deux vaches, un veau, neuf cochons, une vieille jument et un vieux cheval borgne. Il possède aussi une grange, une vieille étable et un four de terre. Le mois suivant, il vend à son fils aîné François la moitié de sa terre, mais le fils la rétrocède au paternel le 23 avril 1743. Le même jour, la terre est revendue à son gendre, Jean-Baptiste Brisson, mais le contrat est annulé au mois de septembre suivant. François Chaumelier décède le 23 mai 1749, à l’âge cité de 84 ans, et est inhumé le lendemain dans le cimetière de la paroisse Saint-Laurent (Montréal). |
Note. Les registres paroissiaux de Riom sont inexistants entre 1607 et 1693. (AD63 en ligne) |
GAUTIER, Paul (c1681-1701) |
Fils de feu Pierre Gautier, chirurgien, et de Marie Thibault, Paul Gautier est natif de la paroisse de Notre-Dame-la-Riche de Tours (Touraine). Il s’engage (18 ans) à Paul Berry, le 25 juin 1699, pour aller travailler au service du sieur Lebert au Canada, durant 3 ans, à raison de 50 livres par année. Il signe. Il quitte la rade de Chef de Baie à La Rochelle, fin juin, à bord du navire La Ville-Marie (200-300 tx) à destination de Québec avec escale à Bordeaux. Il ne terminera pas son engagement, car « paul gautier age de 22 ans de tour de la paroisse de la renée [sic] » entre à l’Hôtel-Dieu de Québec le 17 novembre 1701 et y meurt le 23 novembre suivant, après sept jours d’hospitalisation. |
Note. Des recherches dans les registres de la paroisse Notre-Dame-la-Riche de Tours, entre 1678 et 1683, ont été vaines. (AD37 en ligne) |
LEBAUME, Étienne (c1684- ) |
Fils de feu Étienne Lebaume et de [un blanc], Étienne Lebaume est originaire du faubourg Saint-Pierre de Tours (Touraine). Il s’engage (15 ans) à Paul Berry, le 26 juin 1699, pour aller travailler au service du sieur Lebert à Québec, durant 3 ans, sans aucun salaire. Ne signe pas. Il quitte la rade de Chef de Baie à La Rochelle, fin juin, à bord du navire La Ville-Marie (200-300 tx) à destination de Québec avec escale à Bordeaux. Aucune trace de cet engagé par la suite. |
Note. Des recherches dans les registres des paroisses Saint-Pierre-des-Corps, Saint-Pierre-du-Boile, Saint-Pierre-du-Chardonnet et Saint-Pierre-le-Puellier de Tours, entre 1678 et 1685, ont été vaines. (AD37 en ligne) |
Voir aussi. Fichier Origine. |
Pour citer cet article
Guy Perron©2022, « Les engagés levés par Paul Berry pour Québec en 1699 », Le blogue de Guy Perron, publié le 6 octobre 2022.
[1] J. F. Bosher, Négociants et navires du commerce avec le Canada de 1660 à 1760 : dictionnaire biographique, Ottawa, Ministère des Approvisionnements et Services Canada, 1992, p. 42.
Toutes mes félicitations Guy, très bien rendu cette recherche d’ancêtres et leurs établissements.
J’ai étudier la Côte Notre-Dame-des-Vertus.
Merci pour votre synthèse sur Jean Viau, mon ancêtre. Cela fait plusieurs décennies que je fais sa généalogie. Juste quelques petites précisions.
Le navire « la Ville Marie » quitte probablement fin juin 1699 comme vous le noter, sauf que le navire devait faire escale à Bordeaux avant la traversée pour Québec, certainement pour ramasser d’autres marchandises. Paul Berry est le propriétaire du navire et signe le « 1er avril 1699 a La Rochelle comme propriétaire du navire commandé par le capitaine Jean DURET, pour l’envoyer à Bordeaux et Québec » Voir https://naviresnouvellefrance.net/html/pages16971699.html#jeanviau
Par ailleurs, c’est moi qui ai apporté à l’attention cette nouvelle information que j’ai acquis des responsables du fichier Origine suivant nos communications. Le nom du notaire de La Rochelle est Jacques Grenot, je crois, et non Jean Grenot.
Il semble que Jean Viau fait ses derniers adieux à sa mère patrie à partir du port de Bordeaux, probablement en juillet 1699 en direction de Québec.
Autre petite précision, Jean Viau acquis en 1713 d’un Laguerre dit Rencontre, une terre du côté nord-ouest, juste de l’autre côté du chemin du Roy et de ses terres au sud-est de la cote Notre-Dame de Vertus. Cet acte est sous le patronyme Jean Veau dans le Parchemin (Raimbault, P. 29-01-1713).
En 1717, la cote St-Louis du Bois-Franc s’ouvre et Jean Viau est concédée une terre jusqu’à la Rivière des Prairies. L’acte de 1725 représente seulement un bout de terre rejoignant la terre de 1713 et celle de 1717 du côté nord-ouest du chemin du Roy. En 1737, suivant le délaissement d’une terre par sa belle-mère Françoise Leblanc, Jean Viau appartient 12 arpents de front contigu sur 21 arpents de profondeur du coté sud-est de la cote ND des Vertus et 2.5 arpents sur 30 arpents de profondeur du côté nord-ouest de la côte et au bout de cette terre de 3 arpents de front sur 35 arpents de profondeur rejoignant la Rivière des Prairies. En 1748, il partage ses terres avec ses enfants et son gendre Jacques St-Aubain.
J’ai oublié l’acte de 1740. Jean Viau cède la terre délaissée par Françoise Leblanc, sa belle-mère, veuve de Jean Prevost, épouse en secondes noces avec Pierre Delorme dit Sanscrainte, capitaine de milice. Ce dernier acquis la terre de 7 arpents sur 21 arpents de profondeur en 1710 d’un Robert Pépin. Jean Viau cède cette terre en
1740 en faveur de ses fils ainés Jean-Baptiste Viau et Jacques Viau. En 1748, lors du partage, Jean Viau possède 5 arpents de front sur 21 de profondeur du côté sud-est de la cote ND des Vertus et 2.5 arpents sur 30 arpents de profondeur du côté nord-ouest de la côte et au bout de cette terre de 3 arpents de front sur 35 arpents de profondeur rejoignant la Rivière des Prairies.